La place de la République, forum du monde

Jérôme Godefroy
3 min readOct 19, 2019

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A cheval sur les 3ème, 10ème et 11ème arrondissements de Paris, ces trois hectares couverts de plaques de béton à l’aspect granitique, surmontés par la statue altière de Marianne, voient passer toutes les revendications, toutes les colères et parfois, trop rarement, des joies collectives.

J’habite sur la place depuis 15 ans. Je suis témoin de ces changements incessants d’atmosphère.

Certains jours, les causes à défendre et les messages se côtoient, s’entrechoquent, sans forcément s’opposer. Chacun son drapeau, sa banderole, son cri.

Prenons quelques exemples récents. Voici d’abord les Saharouis (venus de l’ancien Sahara espagnol annexé militairement par le Maroc) qui, en ce 12 octobre 2019, côtoient sur la place les opposants au régime du président Idriss Déby qui dirige le Tchad depuis 28 ans.

Les Saharouis du Front Polisario.
En haut les Saharouis, en bas les opposants tchadiens

Le 15 octobre, ce sont les pompiers de toute la France qui se sont retrouvés sur la place de la République pour attirer l’attention sur leurs conditions de travail.

Pompiers et selfie
Pompier enflammé

Le samedi 19 octobre 2019, la juxtaposition des groupes rassemblés sur la place au même moment était particulièrement hétéroclite. Dans un coin de la place, se rassemblaient des personnes “non-binaires” sexuellement, c’est-à-dire transgenre ou“gender fluid”. Dans un autre coin, des musulmans protestaient à propos de la récente polémique sur le voile islamique. Plus loin, les Kurdes (grands habitués de la place) exprimaient leur colère et leur angoisse à propos de l’offensive turque au nord de la Syrie où se trouve une partie de leur communauté. En prime, on voyait rôder quelques gilets jaunes, derniers Mohicans d’un mouvement en voie d’extinction.

Les militant(e)s non-binaires
Personnes transgenres

Le drapeau de la “fierté transgenre” (ci-dessus, à ne pas confondre avec le drapeau de la fierté non-binaire qui est différent) contient deux bandes bleues en haut et en bas (les garçons), deux bandes roses (les filles) et une bande blanche pour les personnes intersexes ou transgenres ou qui se considèrent elles-mêmes d’un genre neutre ou indéfini.

Les militant(e)s non-binaire ou transgenres (sur le panneau, les cases “masculin” et “féminin” ne sont pas cochées au profit de “Diva de naissance”)
Un gilet jaune, paumé. Notez le petit bouquet jaune au bout du drapeau.
Groupe favorable au port du foulard islamique
Petite pancarte avec un message assez clair à l’intention d’Eric Zemmour
Les Kurdes, avec le drapeau jaune-rouge-vert à l’horizontale, le drapeau du Rojava, l’entité kurde au nord de la Syrie actuellement attaquée par la Turquie
Le drapeau rouge du MKLP, parti marxiste-léniniste de Turquie, clandestin, considéré comme un mouvement terroriste par Erdogan

Et parfois, sur cette même place, un instant d’harmonie, comme cet arc-en-ciel du 9 octobre.

(photos Jérôme Godefroy — octobre 2019)

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Jérôme Godefroy
Jérôme Godefroy

Written by Jérôme Godefroy

Ancien speaker à la TSF. Né sous Vincent Auriol.

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