Les rencontres d’Arles 2021 : clichés du wokisme.
Cela fait des années que je viens aux rencontres photographiques d’Arles. C’est toujours passionnant de déambuler dans cette petite ville biscornue, imprégnée d’une longue histoire romaine et médiévale et pratiquement débarrassée de voitures.
Le plaisir, c’est de découvrir des lieux improbables, un peu déglingués, à la recherche d’une exposition. Certains endroits paraissent hantés. Première déception pour l’édition 2021 (celle de 2020 avait été annulée) : les présenttions sont beaucoup moins nombreuses. Un bon tiers de moins que d’habitude. Peut-être est-ce une conséquence du Covid.
Aucune exposition majeure, aucun choc, si ce n’est l’hommage mérité rendu à Sabine Weiss, 97 ans. Un sorte de Doisneau féminin, injustement méconnue.
Pour le reste, les présentations se déclinent selon la doxa définie par le nouveau directeur des rencontres, le Franco-allemand Christoph Wiesner : “La réécriture de l’histoire post-coloniale, la question des femmes photographes et la représentation du corps noir.” Bref, toute la panoplie du wokisme auquel Arles n’avait jamais encore totalement succombé. Nous avons donc droit aux révoltes du Soudan, à la glorification des petits voyous de Barbès ou encore à l’apartheid. Un monde déchiré et triste.
Presque pas d’espoir et d’optimisme. On est là pour souffrir. Il faut aller jusqu’en Corée du Nord (avec le photos de Stéphan Glandieu) pour trouver un soupçon de vitalité, même si elle est obtenue sous la contrainte d’une dictature.
Quant aux rapports entre les sexes, ils sont clairement compartimentés. Les femmes sont à l’honneur, comme sujets et comme photographes. Comment pourrait-il désormais en être autrement ? Mais les hommes sont à l’écart, traités comme sujets entomologiques. Une vaste exposition s’intitule “Masculinités”. On s’intéresse à l’être de sexe masculin comme s’il s’agissait d’une espèce exotique. “Montrer le mâle”, dit la littérature officiel du festival. Oui, il s’agit presque de montrer le mal.
On peut espérer que le directeur novice élargira sa focale pour les éditions futures. On veut retrouver une photo tonique, ardente, universelle, sans contrainte idéologique. On veut des grands formats (cette année, presque tout est étriqué), on veut de la joie. On veut de la vie. Car la photo, c’est ça. Et épargnez-nous les sermons !
Jérôme Godefroy (Arles, 2 septembre 2021).